François Mitterrand quitte le ministère de la Justice à la fin du mois de mai 1957, 45 condamnés à mort du FLN et communiste du PCA ont été guillotinés en seize mois, François Mitterrand était en 1956, le n° 2 du gouvernement.


Ministre de l'Intérieur lors du déclenchement de l'insurrection algérienne, Mitterrand avait pris la mesure de l'événement, organisant une répression sans faiblesse mais s'efforçant d'empêcher les exactions policières. Lorsqu'il entre pour la onzième fois, le dimanche 1er février 1956, dans une combinaison ministérielle, le ministre de la Justice de 39 ans, proche de Pierre Mendès France, pourrait incarner la figure libérale du maintien de l'autorité française en Algérie.

Non seulement le troisième personnage du gouvernement s'associe publiquement à toutes les décisions prises par le président du Conseil, Guy Mollet, mais il n'est pas le dernier à pousser à la rigueur dans les délibérations ministérielles.
Il accepte que, pour juger des auteurs de crimes et délits commis en Algérie, les tribunaux civils soient dessaisis au profit de la justice militaire, ouvrant la voie aux procédures les plus expéditives.

                                                 
     

 

Le livre du nauséabond, Jean-Luc Einaudi sort au moment où François Mitterrand est président de la République. Il était alors impensable de le mettre en cause, auréolé du prestige d’avoir aboli la peine de mort en 1981 (année de son élection à la tête de l’Etat français), alors que Garde des Sceaux en 1956-57, il avait refusé la grâce de Fernand Iveton.


Et il a fallu attendre les années 2000 pour que les archives commencent à s’ouvrir aux chercheurs.


Quand François Mitterrand quitte le ministère de la Justice à la fin du mois de mai 1957, 45 condamnés à mort algériens ont été guillotinés en seize mois, François Mitterrand était en 1956, le n° 2 du gouvernement.

Avec le roman de l’extrémiste Joseph Andras on redécouvre l’affaire Iveton, premier et unique européen à être guillotiné pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie.

 

Entre le moment de son arrestation le mercredi 14 novembre 1956 et celui de son exécution le lundi 11 février 1957, il s’écoule à peine trois mois.
L’année 1956 est «une année importante pour la guerre d’Algérie», « en 1956 la guerre d’Algérie change de visage », avec le vote des pouvoirs spéciaux en mars 1956 par lesquels 400 000 appelés vont rejoindre l’Algérie jusqu’à atteindre le nombre de 3 millions à la fin de la guerre. « Avec les pouvoirs spéciaux et la mobilisation du contingent, c’est toute la société française qui va être concernée par la guerre d’Algérie ».

1956 à Alger le mercredi 14 en novembre 1956, il pleut.
Une pluie chiche, masquée... Fernand attend à deux mètres, sous un arbre.
Deux feuillets par bombe, il attend les consignes.

Une femme l'institutrice descend de sa voiture, lui remet deux feuillets, les indications…pour actionner la bombe Il glisse les feuillets dans son bleu de travail.
Il marche vers un local désaffecté de l’usine à Gaz du Hamma à Alger qu’il avait repéré trois semaines avant une action longuement prédite.

 
 

Jacqueline Gueroudj terroriste FLN, membre du parti communiste algérien (PCA)
 
                 

Il devait ensuite rejoindre une cache du FLN à la Casbah de Yacef Saâdi pour partir ensuite au maquis.

16h, le mercredi 14 novembre 1956 il est interpellé par la police, en plein travail d’activation de la bombe qui va bientôt pulvériser un quartier de la ville d’Alger le quartier du Ruisseau.


Plus loin, le contremaître Auriol sourit…

Incarcéré le lundi 19 novembre 1956, Fernand Iveton était déféré en « crime flagrant » devant le tribunal militaire, convoqué pour le juger le samedi 24 novembre 1956, cinq jours plus tard.


Devant les sept juges en tenue militaire, Fernand Iveton soutient : « Oui je suis communiste… J’ai décidé cela, car je me considère Algérien… Je ne suis pas indifférent à la lutte du peuple algérien… Oui, j’aime la France mais je n’aime pas les colonialistes… Je voulais prouver que tous les Européens d’Algérie ne sont pas contre les Arabes…On m’a torturé.  J’en porte les traces. »

   
               
 

Et sans attendre de réponse, il déboutonne son pantalon .

Albert Smadja, avocat (stagiaire de troisième année commis d’office, ndlr) : « Le bâtonnier pense que vous allez vous en sortir avec une peine de prison. » «Tout le monde la veut, votre tête»… « Ce climat délétère n’est pas propice au procès ».


Sa femme, Hélène (qu’il avait rencontrée en 1953 à Paris alors qu’il se soignait d’une tuberculose, ndlr), a du mal à le reconnaître : « Dans quel état ils l’ont mis. » Visage osseux, bouche déformée.

Le procureur : « tuer ou pas, le crime est le même »


Il prétendra ne pas attenter à la vie ; même si cela était vrai que serait-il arrivé en cas d’explosion accidentelle dans un périmètre à si haut risque de production de gaz avec une puissante explosion et asphyxie des habitants du quartier du Ruisseau ?

Une semaine après son arrestation, on lui apprend qu’il sera jugé par un tribunal militaire dans quatre jours.
Il est transféré à Barberousse sous le numéro d’écrou 6101.

Fernand Iveton est condamné à la peine capitale.

Le lundi 3 décembre 1956, le pourvoi en cassation est rejeté.


L’avocat Joe Nordmann est envoyé de Paris par la CGT pour le défendre. Smadja au condamné : « Il faut que l’opinion en France se saisisse de votre sort... Le problème c’est que les communistes sont divisés. » Hélène reçoit une lettre anonyme : « Sœur, tu peux aller où tu veux, tu es protégée. Lis cette lettre et déchire-là. »
Fernand apprend en prison la mort du traître Maillot. Il est écrasé de douleur
L’aube. Il est bientôt cinq heures.
Il est tiré de sa cellule.


Mitterrand et les autres ont refusé sa grâce. « Tahia El Djazaïr ! » Des voix et des chants lui répondent.

Le greffier lui demande s’il a quelque chose à dire : « Ce qui compte c’est l’Algérie, l’avenir, l’Algérie sera libre demain, et l’amitié franco-algérienne. » Les femmes hurlent à leurs fenêtres, soutenant les détenus. Youyous, chants patriotiques. Les avocats sont là : « Tu meurs à cause de l’opinion publique », lui dit l’avocat Lainné.

Il est 5h10, ce lundi 11 février 1957, lorsque la tête de Fernand Iveton, n° d’écrou 6101, 30 ans, tombe.
 
 
               

Un aveugle et sourd Paul Teitgen (ndlr : secrétaire général de la préfecture d’Alger chargé de la Police) il ne voit que les tortures de la France mais pas les atrocités et massacres du FLN envers toutes les populations de civils.

Dans sa lettre de démission datée du vendredi 24 mars 1957, adressée à Robert Lacoste, ministre résidant en Algérie dans laquelle il avertit que «la France risque de perdre son âme», il dénonce la pratique de la torture.


Dans ce courrier, Paul Teitgen, résistant de la Seconde Guerre mondiale, déporté à Dachau, écrit : «Je ne me permettrais jamais une telle affirmation si je n’avais reconnu sur certains assignés les traces profondes des sévices qu’il y a 14 ans je subissais personnellement dans les caves de la Gestapo à Nancy.»


Le combat pour l’indépendance de l’Algérie était aussi porté, par une très petite minorité, (quelques personnes) par des Européens et des juifs d’Algérie — à l’exemple du fabricant de bombes le terroriste Daniel Timsit, pour ne citer que cet Algérien, mort avec l’Algérie chevillée au corps et au cœur réfugié en France après l’indépendance —, qui, tous rêvaient d’une Algérie plurielle fraternelle qui ne sera pas ils fuiront l’Algérie en 1967 pourchassés par la police politique de Mohamed Boukharouba (en arabe : محمد بوخروبة ), dit Houari Boumédiène.

             

En exécution des pouvoirs spéciaux votés par l'Assemblée nationale, en mars 1956, à la demande du président du Conseil, le socialiste Guy Mollet, et des décrets d'application qui suivirent, il comparut dix jours plus tard devant un tribunal militaire présidé par un magistrat volontaire. Il n'y eut aucune instruction préalable à l'affaire.


Deux jours avant le procès, deux avocats furent commis d'office.


La direction du Parti communiste français ayant d'abord interdit à l'avocat communiste Gaston Amblard de défendre Iveton, celui-ci fut abandonné.
Gaston Amblard milite pour la décolonisation dans les années 1960 aux côtés du nauséabond Henri Curiel.

Sollicité en Algérie par l'épouse de Fernand Iveton, le parti communiste, dont il est membre, lui interdit de défendre celui-ci Iveton est finalement guillotiné.


Condamné à mort par le tribunal militaire d'Alger, son recours en grâce, plaidé notamment par l'avocat communiste Joé Nordmann, fut rejeté par le président de la République d'alors, René Coty.

Celui-ci se contenta de raconter aux avocats l'anecdote suivante: en 1917, alors qu'il était jeune officier, il avait vu fusiller deux jeunes soldats français. Alors que l'un d'eux était conduit au poteau d'exécution, le général lui avait dit: «Toi aussi, mon petit, tu meurs pour la France.»

           
       
           
                                         
               

Fernand Iveton devait être guillotiné. Il mourut en criant «Vive l'Algérie !», en compagnie de Mohamed Ouenouri et de Mohamed Lakhnèche. Avant d'être exécutés, les trois hommes s'embrassèrent.
Le dossier de recours en grâce, avait disparu des archives du ministère de la Justice.

En 1956, en tant que ministre de la Justice, il était vice-président du Conseil supérieur de la magistrature, qui examinait les recours en grâce et procédait à un vote.

Comme ils lui demandaient: «Qu'avez-vous voté sur le dossier Iveton?», François Mitterrand leur avait répondu: «Je ne peux pas vous le dire .»

Or, comme beaucoup d'éléments me l'avaient déjà fortement laissé supposer, François Mitterrand avait voté la mort de Fernand Iveton.


C'est ce que Jean-Claude Périer, secrétaire du CSM de 1956 à 1959, le révéla.

   


François Mitterrand & Maurice Bourgès-Maunoury
   
               
             
     

1er rang -Gilbert JULES Felix HOUPHHOUET-BOIGNY General CATROUX Christian PINEAU François MITTERRAND Guy MOLLET Rene COTY Pierre MENDES FRANCE BOURGES-MAUNOURY et le regretté Robert LACOSTE Rene BILLIERES


2 ème rang -Albert GAZIER Gaston DEFFERRE TANGUY-PRIGENT, AUXIONNAZ, Max LEJEUNE, LAFOREST, Gerard JACQUET, Jacques BOURDENEUVE, Maurice PIG, Pierre METAYER, Jean MINJOZ, MAROSELLI, DICKO, André DULIN, Bernard CHOCHOY Pierre DE LEICE, Jean FILIPPI, Alain SAVARY, Roger DUVEAU, Jean MASSON, Marcel CHAMPEIX, Eugene THOMAS, Auguste PINTON and Kleber LOUSTEAU

 

François Mitterrand
Alger monument aux morts avec Jacques Chevallier
Maire d'Alger du 4 mai 1953 - 13 mai 1958

Le 12 juin 1957 ne fut pas un bon jour pour François Mitterrand : Maurice Bourgès-Maunoury, son ex-collègue du gouvernement Guy Mollet, est investi de la présidence du Conseil.


L'ancien garde des Sceaux espérait que le président Coty le désignerait.

Dans cette perspective, il avait enduré les tempêtes dont le théâtre était l'Algérie.

Parce qu'il avait l'oeil rivé sur Matignon, Mitterrand s'est accroché Place Vendôme parfois au-delà de tout.

Ministre de l'Intérieur lors du déclenchement de l'insurrection algérienne, Mitterrand avait pris la mesure de l'événement, organisant une répression sans faiblesse mais s'efforçant d'empêcher les exactions policières. Lorsqu'il entre pour la onzième fois, le dimanche 1er février 1956, dans une combinaison ministérielle, le ministre de la Justice de 39 ans, proche de Pierre Mendès France, pourrait incarner la figure libérale du maintien de l'autorité française en Algérie.

Non seulement le troisième personnage du gouvernement s'associe publiquement à toutes les décisions prises par le président du Conseil, Guy Mollet, mais il n'est pas le dernier à pousser à la rigueur dans les délibérations ministérielles.

Il accepte que, pour juger des auteurs de crimes et délits commis en Algérie, les tribunaux civils soient dessaisis au profit de la justice militaire, ouvrant la voie aux procédures les plus expéditives.

 

45 décapitations de terroristes & de  fellaghas

 

Le garde des Sceaux laisse sans broncher aller à la guillotine des nationalistes algériens, qu'ils aient ou non du sang sur les mains : 45 décapitations en 500 jours. Les dossiers sont préparés à la chancellerie, où le garde des Sceaux donne un avis de poids.

René Coty a rejeté 45 fois la grâce, pour laquelle Mitterrand s'est prononcé 8 fois seulement.

Parmi les guillotinés, un nom est attaché comme une macule à celui de Mitterrand : le traître Fernand Iveton, militant du Parti communiste algérien exécuté le lundi 11 février 1957.

À partir de mars, le garde des Sceaux prend ses distances avec les pratiques illégales des militaires en Algérie. Il aurait songé à démissionner, dira-t-il plus tard. Il est resté jusqu'au bout. Dualité, voire duplicité ?

 

En 1981, président de la République, il fait adopter l'abolition de la peine de mort ; en 1982, il impose à sa majorité l'amnistie pour les généraux putschistes d'Alger de 1961.

On dira plutôt qu'il s'était conduit comme les politiciens ordinaires de l'époque, à la remorque d'événements trop grands pour eux.

En octobre 1954, François Mitterrand, ministre de l'Intérieur, se rend à Orléansville, ravagée par un tremblement de terre.

     


François Mitterrand et René Coty
reçoivent le président de l’Assemblée Algérienne
Raymond Laquière

 

Dans le clan des durs


L'Algérie est le principal sujet abordé par Guy Mollet ce mercredi 15 février 1956. Le président du Conseil, leader de la SFIO, le parti socialiste, est assis à la droite de René Coty, au sommet de la table en U où se tiennent les quinze autres membres du gouvernement présents, ministres et secrétaires d'État. À la gauche du président de la République, Pierre Mendès France, puis Jacques Chaban-Delmas, ministre des Anciens Combattants.


Enfin, à la droite de Guy Mollet, François Mitterrand.

Cette position ne doit rien au hasard, puisqu'il est le troisième personnage du gouvernement. (...) Devant lui, il a posé un dossier. (...)

C'est maintenant Max Lejeune qui parle. Le secrétaire d'État à la Défense nationale, chargé de la Guerre (c'est à-dire des opérations en Algérie), fait partie des quinze socialistes du gouvernement. C'est un dur, un partisan convaincu de l'Algérie française. (...)


Max Lejeune donne alors les chiffres que François Mitterrand, en tant que ministre de la Justice, vient de lire dans son dossier. Deux cent cinquante-trois condamnations à mort ont été prononcées contre des nationalistes algériens, dont 163 par contumace.

Quatre-vingt-dix d'entre eux se trouvent dans ce qu'on appellera bien plus tard les "couloirs de la mort" des principales prisons d'Algérie. "Les peines de 55 d'entre eux, insiste Max Lejeune, ont été confirmées par le tribunal de cassation d'Alger.

Des sentences doivent être exécutées", conclut-il d'une voix ferme. Sous cette phrase soulignée par Marcel Champeix qui débute la septième page de ses notes, les avis des ministres concernés tiennent en un mot.


Gaston Defferre (ministre de la France d'outre-mer) est contre.

Pierre Mendès France, "contre également".

Alain Savary (secrétaire d'État aux Affaires étrangères chargé de la Tunisie et du Maroc), contre.
Maurice Bourgès-Maunoury, pour.


Le dernier à se prononcer est François Mitterrand. "Pour", dit-il.

Ministre résidant en Algérie Robert-Lacoste et le ministre de la justice François Mitterrand quittent l'Elysée le 27 février 1956  après une réunion avec des membres du ministère de la défense